Organes-sur-puce, la révolution multiple qui arrive
Terence Ericson
2018-06-01 00:00:00
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Initialement publie sur le site de l'Association Francaise Transhumaniste - Technoprog

Avant tout, qu’est-ce qu’un organe-sur-puce ?

    Les organes-sur-puce sont l’une des meilleures concrétisation des potentialités de la convergence NBIC et de la révolution technologique en cours. En utilisant deux-à-deux des domaines tels que les nanotechnologies et la biologie, il est possible d’en créer de nouveaux. Dans cette idée, en mêlant cultures de cellules souches et microgravures, les organes-sur-puce commencent à faire parler d’eux. Mais ce n’est là que le début. À terme, nous pourrions tous en posséder, et ils pourraient être utilisés par l’ensemble des laboratoires de biologie, des hôpitaux et des médecins.

  Les organes-sur-puce, c’est cette simple idée de recréer sur une puce de la taille d’une petite clé USB, un environnement cellulaire et moléculaire mimant un organe vivant. Par exemple, une des premières cibles de ce jeu de biomimétisme fut nos poumons. Il s’agit de créer sur une puce deux micro-canaux, un pour l’air, un autre pour le sang, avec entre les deux une double couche de cellules. Ces deux couches, appelées endothélium et épithélium, sont les mêmes que nous retrouvons dans ces petites structures de nos poumons appelées alvéoles où se produisent les échanges gazeux (oxygène et dioxyde de carbone) entre l’air et le sang.

    Si cette micro-construction est assez proche du fonctionnement de nos vrais organes, appelé conditions in vivo, il sera alors possible d’y tester un grand nombre de choses, comme des médicaments, des molécules, des vaccins ou encore d’autres traitements complexes. Un vrai laboratoire… sur puce. Et c’est pour cela que ces dispositifs sont aujourd’hui en phase de devenir un des outils les plus importants des entreprises pharmaceutiques, permettant de significativement accélérer la recherche, comme celle contre le vieillissement.



Quels sont les avantages par rapport aux anciennes cultures cellulaires ?



    L’une des grandes caractéristiques de ces puces qui font qu’elles se rapprochent grandement des conditions in vivo, est leur dynamicité. Avant l’apparition des organes-sur-puces, les cellules étaient cultivées sur des surfaces planes et rigides, comme les boîtes de Petri. Cela ne permettait pas de mimer les dynamiques propres aux conditions in vivo, comme la déformation des poumons lors du processus d’expiration / inspiration. Un organe sur puce, lui, est doté de membranes flexibles pour accueillir les cellules, se déformant ainsi au gré des flux sanguins ou des flux d’air, dans le cas précis d’un poumon-sur-puce.

    L’autre grande amélioration est la possibilité, grâce aux techniques de microgravures et de lithographie toujours plus performantes et fines, de créer des structures en 3 dimensions, comme un véritable organe. Il s’agit là d’une étape primordiale là où les anciennes cultures cellulaires se déroulaient sur une surface plane. Ainsi, des structures complexes, par exemple circulaires (vaisseaux sanguins), peuvent être réalisées).



Changer le monde, est-ce vraiment possible avec cette petite puce ?



    Tester des médicaments et toutes sortes de traitements directement sur un organe-sur-puce, permet une double révolution :





Aujourd’hui, l’idée est d’utiliser des cellules souches pour créer ces puces. Notamment, les premières puces utilisent encore des cellules souches de souris ou de rats de laboratoire. Mais demain, l’enjeu ne sera pas de créer un simple organe-sur-puce, mais votre propre organe-sur-puce. En effet, en utilisant des cellules souches directement prélevées dans votre moelle épinière, il sera possible de créer une puce réagissant exactement comme votre propre organisme face à un médicament, un vaccin ou une bactérie. Véritable extension de votre corps, les organes-sur-puce sont en phase de devenir une base de la médecine personnalisée de demain. Une vraie amélioration quand on sait à quel point, en fonction de nombreux facteurs, comme notre génétique, chacun peut réagir différemment face à tel médicament ou telle maladie.



Vers un humain entier sur puce ?



    En effet, pourquoi pas tenter de connecter les puces entre elles, en reliant par exemple les micro-canaux où passe le sang, pour créer un humain sur puce ? Il serait alors possible de tester, par exemple, comment un virus ou une bactérie peut passer via la peau ou les poumons, et cibler ensuite tel ou tel organe. Il serait aussi possible d’administrer un médicament dans un organe précis, et voir si celui-ci se diffuse dans le sang, et est ou non filtré par le rein ou le foie. Le tout sur un laboratoire qui tient dans la main, et sans aucune expérience sur des animaux.



Et la place de la France dans tout cela ?



    La France occupe probablement une très jolie seconde place. Les États-Unis demeurent comme souvent les pionniers, même si les laboratoires travaillant sur le sujet se comptent sur les doigts de la main (Wyss instituteMorgridge institute ou Vanderbilt institute pour citer les principaux). Mais la France tire son épingle du jeu, notamment sous l’élan de la NBIC Valley, initialement Microfluidic Valley. Il s’agit d’un territoire d’innovation situé principalement à Paris, qui regroupe des start-up travaillant dans le domaine des organes-sur-puce. La plupart sont nées sous l’oeil bienveillant d’Elvesys, une entreprise innovante spécialisée dans la microfluidique, qui a créé un incubateur de start-up. L’un de ses fondateurs, Guilhem Velve Casquillas, s’assume transhumaniste et il est membre de l’AFT-Technoprog.

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Pour en savoir plus :

Un TEDx sur le sujet