Pour un transhumanisme « open source »
Alexandre Maurer
2016-11-01 00:00:00
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Originally Published on Technoprog on Sept. 8, 2016

Bien entendu, les univers dystopiques sont plus propices aux fictions que les univers utopiques. Cependant, regardons ces récits de plus près : quelle dimension « dystopique » y revêt le transhumanisme ?





Cependant, de tels scénarios sont peu probables dans le cas d’un transhumanisme « open source ». Essayons d’expliquer pourquoi.

Qu’est-ce que l’open source ?

Prenons un exemple classique : celui des systèmes d’exploitation.

Tout le monde connaît Windows. Ses usagers savent l’utiliser sans difficulté. En revanche, le fonctionnement interne de Windows est une « boîte noire » : seuls les ingénieurs de Microsoft savent comment il est conçu, et seuls eux peuvent y apporter des modifications. En horlogerie, Windows serait l’équivalent d’une montre qui ne peut pas être ouverte : on peut l’utiliser pour lire l’heure, mais pas la démonter ou la réparer soi-même.

A l’opposé, des systèmes d’exploitation comme Linux ou Android (installé sur plus de 86% des smartphones) sont « open source » : le code avec lequel ils sont conçus (« source ») est public et accessible à tous (« open »). Toute personne ayant les compétences suffisantes peut savoir comment Linux ou Android fonctionnent, et si besoin les modifier. En horlogerie, cela correspondrait à une montre que l’on peut facilement ouvrir et démonter, et dont les plans de fabrication sont fournis gratuitement.

Cela a deux intérêts majeurs :





Open source et transhumanisme

Si le concept d’open source s’est popularisé dans le domaine informatique, il n’y est pas du tout exclusif. En particulier, on peut transposer ce concept aux technologies du transhumanisme :





La dimension transparente (les plans de fabrication sont rendus publics) désamorce l’exemple de la « puce de contrôle à distance » donné plus haut : dans un système open source, il est difficile de dissimuler un tel élément. Et la dimension gratuite empêche une multinationale cupide de vendre des « boîtes noires » à prix prohibitif (comme ce médicament pour malades du Sida dont le prix a brutalement été augmenté de 5500%) : chacun peut recréer le produit à prix raisonnable.



Un produit open source ne doit pas nécessairement être directement produit par ses utilisateurs : une entreprise peut se charger de la production. Mais elle ne peut pas exploiter financièrement l’exclusivité d’un quelconque « secret de fabrication », et le prix de vente est alors beaucoup plus proche du coût réel de production. C’est par exemple le cas des médicaments génériques. Par ailleurs, les coûts de fabrication pourraient eux aussi s’effondrer pour certaines technologies :





Dans chaque domaine, l’existence de produits « open source » garantit un accès large et à bas coût au plus grand nombre. Cela met une pression positive sur les entreprises, qui ne peuvent alors plus proposer « moins bien ». Et dans le cas du transhumanisme, l’open source est un excellent bouclier contre les scénarios dystopiques décrits dans certaines œuvres de fiction. Il est donc essentiel de le soutenir et de l’encourager.

Notes

[1] On peut bien sûr modifier ce code source, le compiler pour en faire une « boîte noire », et le vendre. Cependant, les programmes sous licence GNU GPL interdisent cela : tout produit dérivé d’un tel programme doit obligatoirement être open source (le contraire étant puni par la loi). Il s’agit là d’un véritable « copyright inversé », empêchant tout forme de copyright subséquent. D’autres licences, comme celles de la famille BSD, autorisent les produits dérivés non-open source.