L'affaire Steve Mann (MacDoGate) ou les débuts de la lutte pour les droits du "Cyborg"
Marc Roux
2016-05-09 00:00:00
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Rappel : Si les faits sont avérés, Steve Mann, ingénieur canadien malvoyant inventeur et porteur d'un système de lunettes de réalité augmentée avec caméra intégrée, a été pris à partie par le personnel dans un restaurant de la chaîne alors qu'il visitait Paris en famille. Les agents ont tenté de lui arracher ses lunettes qu'il porte fixées chirurgicalement à son crâne. Le mobile apparent en aurait été les consignes d'interdiction de photographier ou de filmer l'intérieur de l'établissement peut-être données par le gérant.

Cette affaire, qui a rapidement défrayé la chronique dés qu'elle à été connue, interpelle forcément les transhumanistes du monde entier.



- Steve Mann est un "transhumain", au sens que la technologie dont il dispose non seulement fait de lui un homme réparé, mais un homme augmenté.



- Les transhumanistes doivent se préparer à affronter de manière organisée et solidaire ce genre d'événements en se dotant par avance des outils éventuellement juridiques dont ils pourraient avoir besoin. Ceci pourrait comprendre par exemple des statuts permettant explicitement d'acter en justice afin de soutenir la défense d'une personne demandant leur soutien. Ceci devrait être accompagné de la prise de contact avec des experts judiciaires (avocats ou autres) susceptibles de nous conseiller.



Une association comme L'AFT Technoprog! devrait pouvoir se porter partie civile en cas de dépôt de plainte dans une telle affaire. Elle devrait pouvoir intervenir pour faire valoir que les valeurs et les intérêts qu'elle défend sont lésés et que la liberté et la sécurité de toute personne pratiquant une démarche transhumaniste proactive est mise en danger par de telles réactions ainsi que par l'inadaptation des réglementations et de la législation.



- La législation doit en permanence être révisée pour s'adapter à l'évolution transhumaniste. Comme l'a très justement analysé Anders Sandberg (voir ce message), l'affaire Steve Mann pose de façon aiguë la question de savoir qui doit posséder le contrôle de la mémorisation numérique de l'enregistrement d'images dans un lieu public ou privé. Jusqu'à présent, tant que les moyens d'enregistrement étaient complètement externes aux utilisateurs (caméras, appareil photos ...), il était admis que le propriétaire d'un lieu puisse exiger l'interdiction de filmer sans son autorisation. Pour autant, aucun propriétaire n'a jamais songé sérieusement d’interdire à qui que se soit de se souvenir de ce qu'il voyait dans son établissement. Mais à partir du moment où le moyen d'enregistrement technique commence à faire partie intégrante de la personne qui l'utilise, ces deux principes de liberté entre en concurrence.



Lequel des deux doit-il prévaloir ?



Il me semble évident que nous devons considérer que dans ce cas, il n'y a plus de différence fondamentale, et juridique, entre les capacités biologiques originelles de mémorisation de la personne et ses capacités nouvelles permises par la technologie. La technologie fait alors complètement "corps" avec la personne. Elle en est devenue indissociable et vouloir l'en priver revient à porter atteinte à son intégrité physique.



Vous constaterez en passant que cette évolution de notre conception du rapport entre le corps biologique et les implants et prothèses diverses qui viennent peu à peu l'augmenter nous conduit à nous pencher sur une question qui pourrait devenir rapidement brûlante : la définition des droits du futur "citoyen cyborg".